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Jazz et Gwoka : la belle alliance

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Jazz et Gwoka : la belle alliance

Klod-Kiavué crédit : Ph. Virapin

SYNCOPE n °10 mars 2005

Echange avec le tanbouyé Klod Kiavué et le saxophoniste David Murray autour de la rencontre Jazz et Gwoka.

Dans quelles circonstances avez-vous rencontré David Murray ?

Klod Kiavué : Nous étions tous les deux en résidence au festival Banlieues Bleues de 1995. J’intervenais sur les chants et les rythmes du Gwoka et David Murray, lui sur le Gospel. A la fin du festival, nous avons eu un échange et il a eu une surprise en découvrant le Gwoka.

Qu’est-ce qui vous a attiré vers le Gwoka ?

David Murray : Les tambours ! Oui, les tanbou. Ils ressemblent à ceux d’Afrique mais ils ne sont pas tout à fait pareils et c’est cette différence que j’aime. Quand j’ai commencé à comprendre cette musique et à connaître son histoire, notamment grâce à Gérard Lockel (1), elle m’a vraiment intéressée. Klòd Kiuavé m’a aidé à comprendre les rythmes et comment ils fonctionnaient ensemble. De la même manière, je l’ai aidé à comprendre la batterie Jazz.

Avant de jouer avec David Murray, quel intérêt portiez-vous au Jazz ?

Klod Kiavué : Je n’ai jamais conçu de cloisonnement entre les musiques. Mon père écoutait toutes sortes de musiques : Jazz, Blues, chanson française, Gwoka. Cela a forgé mon éducation musicale. En Guadeloupe, je jouais dans des groupes de tambours et pour moi, c’était une musique comme les autres. Je savais qu’en tant que tanbouyé, je pouvais communiquer avec des musiciens d’ailleurs. Cela m’a paru encore plus naturel avec Murray : Africains-Américains et Caribéens sommes proches, en dépit du fait que nous avons été colonisés par des pays différents.

Comment se traduit musicalement cette rencontre du Jazz et du Gwoka ?

Klod Kiavué : Au départ, il y a la musique,  » mizik se mizik « , notre langage commun… David Murray est venu en Guadeloupe, il s’est imprégné du pays et on a beaucoup discuté. Il a écrit des thèmes à partir de sa perception du Gwoka, sur lesquels il m’a demandé de poser des rythmes. J’ai aussi proposé les miens, afin de lui montrer ce que je voulais exprimer en tant que Guadeloupéen. Sur  » Créole Project  » (1998), le 1er album que nous avons réalisé ensemble, il y a des pièces qui sont des improvisations de Gérard Lockel et David Murray. Avant d’entrer en studio, ils ont discuté de leur philosophie personnelle, de ce qui les intéresse musicalement, et ensuite ils ont enregistré. Sur le suivant,  » Yonn-Dé  » (2002), Guy Konkèt chante. Donc la musique était organisée autour de lui, avec ses arrangements et ceux de Murray.  » Gwotèt « , notre dernier-né, est le fruit d’une véritable ouverture. J’estime que mes propres compositions ne sont pas totalement du Gwoka et que celles de Murray sont, elles aussi, ouvertes. Je les définirais comme étant de la  » mizik a Nèg « , oui, c’est comme cela que nous aimons l’appeler, une musique universelle des peuples noirs.

David Murray : Le Jazz est capable d’accepter toutes les musiques et de leur apporter de la sophistication, c’est comme ça ! Je ne sais pas pourquoi.

Que retirez-vous de cette expérience ?

Klod Kiavué : Murray et les autres musiciens sont des pointures qui depuis plus de trente ans, vivent de leur musique. Nous travaillons énormément, il y a un niveau très élevé dans le groupe et nous évoluons dans un environnement très professionnel. Tout cela m’est bénéfique. Mais il ne faut pas non plus que nous sous-estimions notre propre apport en ce qui concerne les rythmes, les nôtres sont aussi extrêmement sophistiqués

(c) Propos recueillis par Franck Salin et traduits par Diyo Laban

(1) Guitariste guadeloupéen, inventeur du Gwoka modèn.
Ecouter CD “ Gwotèt “ David Murray and the Gwo-Ka Masters Justin Time / Harmonia Mundi. 2004

 

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